L’article 1792 du code civil institue une présomption de responsabilité pour les dommages les plus graves affectant certaines constructions.
Cette responsabilité, d’une durée de 10 ans à compter de la réception de la construction, est dite « responsabilité décennale » (Vous pouvez consulter sur ce blog l’article « La responsabilité des constructeurs »; vous pouvez par ailleurs accéder ici à l’article 1792 du code civil).
Les causes d’exonération.
La personne chargée de la construction pourra toutefois échapper à cette responsabilité dans certaines circonstances :
1/ Si les dommages sont imputables à un événement de force majeure : pour que l’existence d’une situation de force majeure soit retenue, il faut qu’elle soit irrésistible (que l’on ne puisse pas en empêcher la survenance), imprévisible et extérieure.
2/ Lorsque les dommages sont dus à une immixtion fautive du maître de l’ouvrage dans la construction.
3/ L’acceptation délibérée des risques par le maître de l’ouvrage avait parfois été reconnue par les juges comme constituant une cause d’exonération de la responsabilité des constructeurs.
Il faut refuser de réaliser des travaux non conformes aux règles de l’art, même en cas d’acceptation des risques par le maître d’ouvrage.
Toutefois, cela ne semble plus être l’avis de la Cour de cassation.
C’est en effet ce qui ressort d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 21 mai 2014 (Civ. 3ème, 21 mai 2014, n° 13-16855).
Dans cette affaire, le constructeur avait été condamné par les juges d’appel.
A l’appui de son pourvoi, se prévalant de l’acceptation des risques par le maître d’ouvrage, il faisait valoir qu’un premier devis de travaux avait été refusé par le maître d’ouvrage par souci d’économie, et qu’avait été établi un second devis pour des travaux provisoires moins onéreux, dans lequel était formulé une mise en garde du maître de l’ouvrage ainsi rédigée :
« Le caractère vétuste général de la toiture empêche toute garantie de ces travaux. Le conseil du professionnel serait d’exécuter les travaux de manière définitive ».
Le maître d’ouvrage avait toutefois accepté ce second devis.
Ainsi, le maître d’ouvrage avait été averti par le constructeur de l’existence de risques liés à l’exécution de travaux provisoires.
Toutefois, selon la Cour de cassation, ceci ne suffisait pas à exonérer le constructeur de sa responsabilité.
Celui-ci aurait du refuser d’exécuter les travaux.
La Cour de cassation se prononce en effet ainsi :
« Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, sans dénaturation, qu’il appartenait à la société SEP, en sa qualité de professionnelle, de faire des travaux conformes aux règles de l’art et d’accomplir son travail avec sérieux, ce qui n’avait pas été le cas ainsi que cela résultait du rapport d’expertise, et de refuser d’exécuter les travaux qu’elle savait inefficaces, la cour d’appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision. »
En conclusion, même si le maître d’ouvrage est informé de non-conformité de son projet, le constructeur doit refuser sa réalisation.